admin1143 / 7 juin 2018
Dans les modèles économiques les plus simples, la productivité est ce qui domine. Les travailleurs sont payés exactement et précisément en fonction de leur contribution à la production de l’entreprise. S’ils étaient moins bien payés, les concurrents pourraient en profiter pour les attirer avec des salaires plus élevés, et les salaires monteraient jusqu’à ce qu’ils s’alignent sur la productivité. Les entreprises qui paient les travailleurs plus que ce qu’ils apportent seraient perdantes sans raison. Ce genre de point de vue suggère quelques façons d’améliorer le sort des travailleurs. Les gouvernements pourraient adopter des politiques qui aideraient les travailleurs à passer d’un emploi à faible productivité à un emploi à forte productivité, par exemple. Cela pourrait signifier investir dans l’éducation et la formation, ou bien éliminer les obstacles au déménagement ou au passage d’un employeur à un autre, que représentent les coûts élevés du logement dans les endroits où il y a des entreprises productives, ou bien encore assouplir les lois qui comprennent des clauses de non-concurrence dans les contrats de travail. Lorsque les stratégies d’accroissement de la productivité ne suffisent pas, la meilleure option d’un gouvernement est de monter les bas salaires aussi efficacement que possible. Les économistes apprécient les subventions salariales, comme l’impôt négatif proposé par Milton Friedman en 1962, qui a influencé la conception du crédit d’impôt américain. De telles subventions encouragent les gens à rester au travail afin de se qualifier et ne font pas monter le coût du travailleur, qui découragerait l’embauche. Elles sont également simples à administrer. Mais il est clair depuis longtemps que la fixation des salaires est plus compliquée que ne le permettent les modèles les plus simples. La croissance de la rémunération est liée à la croissance de la productivité, comme l’ont souligné Anna Stansbury et Lawrence Summers dans un article publié l’an dernier. Mais d’autres influences semblent faire baisser les salaires. Ainsi, la productivité du travail a augmenté de 75 % en Amérique entre 1973 et 2016, tandis que le salaire moyen a augmenté de moins de 50 % et le salaire médian d’un peu plus de 10 %. Un lien direct entre le salaire et la productivité impliquerait que l’augmentation du salaire minimum réduirait automatiquement l’embauche, car les travailleurs qui avaient été payés en fonction de leur contribution sont soudainement devenus surpayés (et, peu de temps après, se sont retrouvés au chômage). Mais aucune relation aussi claire et négative n’apparaît dans les données. La raison, selon les économistes, c’est le pouvoir. Les nouvelles recrues génèrent un excédent, ce qui reflète le fait que le travailleur et l’entreprise s’attendent à tirer profit de la transaction. La négociation salariale est une négociation sur la façon de répartir cet excédent. Si les entreprises ont le dessus, parce qu’un nouvel emploi est plus difficile à trouver qu’un nouveau travailleur, les employeurs captent la majeure partie de l’excédent, ce qui crée un écart entre la valeur créée par les travailleurs et ce qu’ils sont payés. Une hausse du salaire minimum pourrait alors stimuler les salaires sans réduire l’emploi en redistribuant une partie de cet excédent, laissant une entreprise avec un gain plus faible qu’auparavant, mais un gain néanmoins.
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